samedi 22 avril 2017

Emeutes à Los Angeles - 1972 - Oscar WILLIAMS

Très belle affiche!
Titre original: The Final Comedown

Johnny est un jeune afro-américain qui vit dans les bas-fonds de Los Angeles. Subissant quotidiennement les vexations et les humiliations de la police et de la majorité blanche, il va se radicaliser et prendre les armes.

The Final Comedown n'est pas, contrairement aux apparences, un film de blaxploitation classique. Il ne s'agit pas simplement de faire jouer par un noir des aventures de blancs. D'ailleurs le film n'est pas produit pas un studio de cinéma classique ou d'exploitation, mais par les auteurs eux-mêmes. Le mouvement politique auquel Johnny adhère fait penser au Black Panthers Party, même s'il n'est pas nommé précisément (Sur un mur de la chambre de Johnny, on peut voir un portrait de Huey P. NEWTON). Le film a l'intelligence de ne pas faire de son héros un martyr, et se montre assez critique vis-à-vis du recours à la lutte armée. Cependant, The Final Comedown est avant tout un film guérilla et militant qui est contemporain des évènements qu'il décrit et veut combattre. Il s'agit avant tout d'un trac politique pour dénoncer l'oppression dont étaient victimes les afro-américains.  C'est sa force et sa faiblesse. Le spectateur est amené à prendre fait et cause pour Johnny, mais The Final Comedown ne fera que convaincre ceux qui sont déjà convaincus.

Si le message est intéressant, que vaut le film en tant que tel? Oscar WILIAMS n'a eu qu'un budget des plus réduits, mais il s'en est plutôt bien tiré. Le montage est très habile pour dynamiser le récit, le film est conçu comme étant une série de flashbacks. Certains plans montrent un vrai sens de l'image et sont très habilement construits. D'après IMDB, WILLIAMS n'a quasiment rien fait après les années 70, ce qui est dommage car The Final Comedown montre qu'il possédait de vraies qualités de cinéaste.


Quelques temps après une première sortie, le film a été racheté par Roger CORMAN. Il l'a remonté, y rajoutant une demi-heure et en édulcorant le message politique, puis le ressortant sous le titre de Blast. Le nom du réalisateur sur cette affiche n'est pas Oscar WILLIAMS.





Huet P. NEWTON, co-fondateur du Black Panther Party.





Johnny, interprété par Billy Dee WILLIAMS, futur Lando CALRISSIAN dans les épisodes V et VI de Star Wars.

dimanche 9 avril 2017

Cut-Throats Nine - 1972 - Joaquín Luis Romero MARCHENT

Titre original: Condenados a vivir

Des condamnés et leurs gardiens sont envoyés vers une mine située dans les montagnes. Lors du trajet, ils sont attaqués par un groupe de bandits. Les survivants, un groupe de détenus enchainés ainsi qu'un gardien et sa fille, vont essayer de traverser les montagnes à pied en plein hiver.

Cut-Throats Nine est un western-paella: lorsque les italiens commencèrent à réaliser des westerns, ils utilisèrent les décors naturels de l'Espagne, en particulier la ville d'Almeria. Beaucoup de western-spaghetti sont en fait des coproductions italo-espagnoles. Cut-Throats Nine est un film dont le financement est ibérique, ainsi que le réalisateur et la majorité du casting. Cela ne change pas grand chose car on retrouve la plupart des tics du cinéma transalpin: violence froide, personnages cyniques et amoraux, musique crépusculaire et lyrique... La grande différence réside dans l'approche froide et brutale des personnages: beaucoup de westerns de cette époque ont comme principaux protagonistes des brutes ou des truands, mais leur caractère vil et ignoble est souvent adouci par un humour au second degré. Les personnages de Sergio LEONE sont souvent à la limite de la caricature, ce qui rend leurs actes moins choquants pour le spectateur. Dans Cut-Throats Nine, les criminels sont montrées comme d’authentiques brutes sans scrupules auxquelles on ne peut que difficilement s'attacher.

Cut-Throats Nine est réputé pour être extrêmement violent, à la limite du gore. S'il contient quelques passages sanguinolents, surtout pour l'époque, il est moins choquant qu'un film comme Tire encore si tu peux. Le casting est le principal point fort du film: d'authentiques affreuses tronches burinés et taillées au couteau auxquelles on ne peut faire confiance. Dès le début, on est plongé dans une ambiance glauque dont on sait qu'elle ne peut que mal se finir. Pas un personnage pour rattraper l'autre. Si le film est très réussi durant la première moitié, il s’essouffle dans la seconde partie: le réalisateur ne sait pas trop ce qu'il peut faire avec ses anti-héros et l'ensemble tourne un peu rond. Sans être une pépite oubliée qu'il faudrait redécouvrir absolument, Cut-Throats Nine mérite largement le coup d’œil.











dimanche 2 avril 2017

Le Gang des Antillais - 2016 - Jean-Claude BARNY

Dans la France des années 70, quand le président s'appelait GISCARD... Jimmy, jeune martiniquais venu en Métropole grâce au BUMIDOM, connait de grandes difficultés à s'insérer socialement. Avec d'autres antillais, il va former un gang de braqueurs.

Le BUMIDOM est un organisme d'état créé en 1963 et qui disparut au début des années 80. Il fut chargé de faire venir des antillais et des réunionnais en Métropole afin de leur fournir une formation et un emploi. A l'époque, la situation en outre-mer était particulièrement difficile: surpopulation, manque de croissance économique, fort taux de chômage... Le BUMIDOM devait en partie régler ces problèmes. La France connaissait une forte croissance économique et avait besoin de bras pour faire tourner la machine industrielle. Les antillo-réunionais occupèrent des postes faiblement qualifiés qui s'avérèrent très différents de ce qui leur avait été promis. En plus des difficultés sociales, ils subirent le racisme des métropolitains. Même si la Martinique et la Guadeloupe sont françaises depuis cinq siècles, beaucoup d'autochtones ne se génèrent pas pour rappeler aux insulaires qu'ils n'étaient que des "sales nègres". Malgré la déception et le choc qu'ils éprouvèrent, il leur était impossible de rentrer chez eux car le prix du billet était beaucoup trop élevé. L'immigration est souvent vue comme un bloc homogène alors qu'elle a de multiples facettes. Le Gang des Antillais parle d'une histoire qui reste peu connue en Métropole alors qu'elle est un sujet brûlant en Outre-Mer.

La principale qualité du film est son casting: les acteurs qui composent le gang sont très charismatiques et convaincants. Eriq EBOUANEY est particulièrement impressionnant dans le rôle de Politik, le chef de bande qui pense mener un combat social à travers ses hold-ups. Le ton du Gang des Antillais oscille entre film de braquage et conscience de classe. Chacun des personnages a ses propres buts, notamment l'argent ou la lutte contre le colonialisme. Mais aucun d'entre eux n'apparait comme caricatural. Jimmy est un héros attachant, partagé entre l'amour qu'il porte à sa fille et son envie de belles sapes.

Cependant, si Le Gang des Antillais a un propos juste et intéressant, le film souffre d'un manque de moyens financiers qui se voit particulièrement à l'écran. La mise en scène, sans être honteuse, ressemble à celle d'un téléfilm. Le réalisateur fait avec ce qu'il a, le résultat est honorable mais les fissures sont souvent visibles. Par ailleurs, certains dialogues sonnent parfois faux. De plus, le film s'inspirant d'un récit autobiographique, le personnage de Jimmy apparait parfois comme un peu trop sympathique. Malgré ces défauts, Le Gang des Antillais est intéressant à voir. Il aborde un sujet trop méconnu de ce côté de l'Atlantique et le traite intelligemment. On n'est pas en présence d'un grand film de gangster à la sauce blaxploitation, mais d'une œuvre sympathique qui se laisse voir avec plaisir.