dimanche 2 octobre 2016

F.I.S.T. - 1978 - Norman JEWISON / Hoffa - 1992 - Danny DE VITO

L'histoire de Johnny KOVAK, manutentionnaire injustement licencié qui deviendra l'un des plus puissants syndicalistes des États-Unis.

Le mouvement ouvrier américain a une histoire riche et complexe. Cela est un peu oublié, mais les premières luttes pour les droits des prolétaires ont eu lieu dans la patrie de l'Uncle Sam.

F.I.S.T. est inspiré de la vie de Jimmy HOFFA, patron du syndicat des camionneurs (les Teamsters) qui disparut en 1975, probablement coulé dans un bloc de béton par la Mafia de Chicago (l'Outfit). L'homme est une figure riche et complexe, qui défendit les travailleurs et s'acoquina avec le crime organisé. C'est son fils, James P. HOFFA, qui dirige actuellement les Teamsters.

En 1978, Sylvester STALLONE sort du triomphe critique et public du premier ROCKY. Ce dernier a d'ailleurs de nombreux points communs avec Johnny KOVAK: prolétaire blanc sans avenir, il ne s'en sortira que grâce à sa force de caractère et à ses poings. F.I.S.T est une fresque historique qui vise à rendre compte de toute la complexité de son héros: tout d'abord sincère dans son combat pour ses camarades, il va peu à peu perdre son âme, devenir un apparatchik grimpant dans la hiérarchie par des coups bas et des magouilles. Le film a de nombreuses qualités dont la première est son script: F.I.S.T. est une véritable leçon d'histoire qui montre pourquoi certains syndicats américains durent s'allier avec la Mafia pour faire face à la violence des milices patronales. Cela explique d'ailleurs pourquoi Chicago est à la fois la ville d'Al CAPONE et un bastion du mouvement ouvrier. La prestation de STALLONE, dont on a oublié qu'il pouvait être un grand acteur, souligne le déchirement du personnage pris en étau entre la défense de ses camarades et les criminels qui lui ont permis d'être là où il en est. Certes le vrai HOFFA avait peut-être moins de scrupules, mais F.I.S.T ne fait que s'inspirer de sa vie.

Norman JEWISON a fait une excellente reconstitution du Cleveland ouvrier des années 30 et les scènes de bagarres entre grévistes et garde-chiourme du patronat sont spectaculaires. Certaines choses ne fonctionnent pas réellement, comme la romance que vit Johnny, histoire d'amour qui renvoie à celle avec Adrian dans Rocky, mais globalement le film est excellent.

Pour la petite anecdote, F.I.S.T évoque le financement, via la caisse de retraite des camionneurs, de l'achat de casinos à Las Vegas par l'Outfit. Cet évènement est raconté d'une manière plus détaillée dans le film Casino de Martin SCORSESE.

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En 1992, sort Hoffa de Danny DE VITO. Si F.I.S.T s'inspirait de la vie de HOFFA, ce film veut être une biographie plus réaliste. Le leader syndical, interprété par Jack NICHOLSON, y est présenté comme une franche canaille, pour qui l'alliance avec la Mafia ne lui pose pas de problèmes  tant qu'il garde le pouvoir et peut se remplir les poches. Là où STALLONE passait pour un homme sincère qui avait perdu son âme, NICHOLSON est une authentique crapule. On en sait assez peu sur lui, ses origines, comment il est devenu syndicaliste, on a de ce fait du mal à ressentir une réelle empathie pour le personnage.

Hoffa sonne plus comme un film de gangsters, très inspiré par Les Affranchis. La reconstitution est moins réussie, moins réaliste, certaines scènes ayant un aspect carton-pâte assez prononcé. Dans sa mise en scène, DE VITO a une fâcheuse tendance à user et abuser d'effets dramatiques (musiques, ralentis...) qui s'avèrent assez pénibles. La façon dont il gère les transitions est symptomatique d'une volonté d'en mettre plein la vue aux spectateurs, même si cela ne sert à rien. Et surtout, DE VITO a oublié que montrer un gangster n'est pas une fin en soi si on a rien à dire: dans Les Affranchis, le personnage d'Henry HILL, d'abord fasciné par les voyous, comprend peu à peu qu'il est tombé dans un milieu sordide où l'amitié n'existe pas. DE VITO nous montre un HOFFA sans scrupules et prêt à tout, qui n'a aucune réelle évolution psychologique. Peut-être que le vrai Jimmy HOFFA n'a jamais été sincère dans son combat, mais le personnage est de ce fait moins intéressant à l'écran que celui interprété par STALLONE.

Le film est heureusement sauvé par la formidable prestation de NICHOLSON qui offre de beaux moments de bravoures, notamment pour la scène d'audition au Sénat face à Robert KENNEDY.

Hoffa est peut-être plus proche du vrai Jimmy HOFFA. Cependant, si biographiquement le film est plus intéressant que F.I.S.T, il l'est moins cinématographiquement.

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